A l'invitation de Stéphane, je me suis rendu dans son antre, les Fabriques du Ponant où l'on trouve aussi le Tyfab, les Petits Débrouillards et une start-up appelée Robot Seed, le tout logé dans un local aux franges du lycée Vauban à Brest. L'ambiance, comme toujours dans ces autrement nommés "tiers lieux", est un doux mélange de bordel indescriptible, bonhommie associative et travail appliqué par des bricoleurs de l'âge numérique.
J'y trouvais là un jeune homme qui terminait une fraiseuse numérique conçue par lui et montée de ses mains, affichant le plein sourire de celui qui a réalisé un vrai "truc" et qui s'est ainsi rendu compte qu'il en était vraiment capable, ceci en appelant d'autres à suivre. Je discutais avec des ingénieurs et des techniciens engloutis par des canapés d'âge canonique, réemployés de justesse avant la benne, parlant de tout et de rien, de techniques et de projets, dans une transversalité totale, dans une écoute d'une exigence rare et toujours dans le souci de trouver une solution.
Je croisais aussi Mathieu, qui finalise les gravures laser des ses photos grand format. Chacun vient avec son idée sotte et grenue et rencontre là d'autres bricoleurs confirmés ou débutants, venus là pour partager idées, suggestions, projets ou pour tout bonnement donner un coup de main. Tous viennent là résoudre un problème. Leur problème, celui dont ils savent que d'autres l'aideront non seulement à le résoudre et mais qu'ils pourront à leur tour dépanner. Et apprendre. Des autres. De tout le monde. De chacun.
Du militantisme pur et simple, sans grands mots ni grands soirs, pour proposer une alternative à la surconsommation des matières, des personnes et du temps. Prendre ce moment rare. Et se mettre à l'œuvre. Avec d'autres. Constituer un réseau social hybride, une société patraque remise sur une paillasse un peu foutraque et alors, un apprentissage sincère de sa liberté de faire, de penser, de partager.
Il parait que l'U.B.O. envisage de monter un FabLab universitaire : bonne idée, ces académiques qui se réunissent, en dehors de leur laboratoire habituel et en dehors de leur discipline, qui mettent la main à la pâte et se donnent ainsi les chances de concrétiser un dispositif de recherche sur leur champ initial. Aujourd'hui, la "bricologie" est devenue une coopération inventive qui a su intégrer les makers dans le hackerspace, le terme FabLab étant le marketing de la démarche sous les bons auspices du M.I.T. depuis 15 ans. Dans un contexte breton et particulièrement brestois, où mutuelles et coopératives ont structuré le travail et l'économie sociale depuis l'origine, la démarche mériterait de "passer à l'échelle" pour redynamiser un territoire au bout du souffle des industries agroalimentaires ou de défense. Une façon aussi d'offrir des perspectives à des personnes qui ont raison de vouloir vivre et travailler au pays selon des modalités contemporaines. Le numérique pour concentrer et redistribuer les énergies positives, en quelque sorte.
Du pain sur la planche, du cœur à l'ouvrage, bricologie et toutes ces sortes de choses. A Brest, maintenant.