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Renaud P. Gaultier

Peintures, Installations et Textes

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"Mourning Boy ?", Renaud Gaultier 2018.

"Mourning Boy ?", Renaud Gaultier 2018.

Exposé des faits / Points de Pouvoir

Ce travail développe une réflexion sensible sur le deuil et le détachement, vis à vis de l'enfance et de ses traumatismes. S'il est des ancrages physiques dans un monde fluctuant sinon flottant, il est aussi des encrages psychiques indélébiles dans un corps marqué par la violence. Il s'ensuit alors des cycles d'analyse et de tentatives d'explicitation du mal, dit ou vécu.

Histoire d’un objet fluctuant

« Durant tout l’automne 2017 et l’hiver 2018, j’ai amarré mon bateau, un Ponant de 1966 au corps-mort familial hérité de mon père, en nord Finistère, à la pointe de la Bretagne, à la limite géographique de la Manche et de l’océan Atlantique.

Le Ponant est un dériveur familial de 5,25 m de long et de 1,98 m de large conçu en 1956 par Pierre Deschamps* et construit en série par le chantier éponyme jusque dans les années 80. Il est très répandu en France, Belgique, Luxembourg, Italie. Son matériau, la fibre de verre, utilisé pour la coque et ses espars, mat et bôme, en fit un voilier d’agrément particulièrement novateur. Son symbole est le cheval cabré rouge, à l’instar d’une célèbre marque d’automobile italienne, et ses traits distinctifs sont ses bouchains vifs, c’est à dire les angles de ses bordés, ses lignes tendues et son foc (voile d’avant) rouge.

Un corps-mort est un mouillage sur un point fixe et se compose habituellement d’une ancre enterrée, d’une chaîne et d’un cordage relié à une bouée que l’on vient frapper sur le taquet du bord.

Ce Ponant, que j’ai enregistré sous le nom de « Barbarian », n° de série 2564 a été exposé aux intempéries et aux aléas durant près de 9 mois d’affilée, entre août 2017 et avril 2018. La digue, construite avec les indemnités du naufrage de l’Amoco Cadiz de 1978, et censée protéger la baie où il fut mouillé, s’affaisse depuis quelques années. Cet ouvrage d’art rustique, fait de blocs de roches monumentaux, ne peut plus entraver la houle hivernale et les vagues qui viennent se briser sur la plage.

Le 10 novembre, je suis averti par un riverain et propriétaire d’un voilier que le mat du Ponant est tombé. Il m’envoie les photos de ce qu’il estime être les preuves d’un acte de malveillance, le hauban babord sectionné. Il me recommande de déposer plainte.

Une succession de dépressions nées en Atlantique génère des tempêtes aux noms divers, qui toutes s’abattent sur la pointe occidentale de l’Europe. Le Ponant prend l’eau, sans que je sache si c’est « l’eau du ciel » due aux abondantes précipitations ou « l’eau d’en bas », la mer, due aux vagues qui secouent le bateau en tout sens. Je vais régulièrement vider l’eau au moyen d’un seau et d’une écope. Des algues élisent domicile dans le bateau.

Le 5 avril, je me munis de Blanc de Meudon dilué dans l’eau d’un bocal à confiture et d‘un pinceau rond à rechampir. Je peins les inscriptions suivantes : « To rape a child is a major crime » à tribord et « to beat a child is a violent crime «  à babord. Etant donné le vent de sud-est orienté ce jour là, le côté tribord est visible depuis la plage et la route de corniche qui la surmonte.

Aux alentours du 21 avril, de retour de voyage, je constate que le bateau a quitté son corps mort. Acte de malveillance, rupture du « bout d’amarrage », pourtant de section élevée, je ne saurai dire. Déjà, en février, j’avais constaté que le bout avait quitté ses chaumards, qui servent à le guider et le fixer sur l’avant du bateau.

J’appelle le responsable du port, qui s’en émeut vivement et appelle le président bénévole de la station SNSM (Société nationale de Sauvetage en mer) locale. Réponse : il y aurait un bateau de ce type échoué et mis sur une dune après avoir été retrouvé à la dérive. Vérification faite, c’est bien lui. Commence alors une opération de retrait du bateau et de sa mise « au vert », sur une aire à battre désaffectée, là où le fléau s’est tu, à quelques kilomètres dans les terres.

Une fois retournée, la coque montre quelques enfoncements et une crevure. La fibre est distendue par endroits.

Je prends quelques photos et réfléchis à ce qui s’est passé.

Le récit en images sur un support « PowerPoint® » s’impose alors de lui même : logiciel de présentation utilisé par des centaines de millions d’utilisateurs depuis son lancement en 1987, il a été critiqué pour la réduction de la pensée à des « bullets », des points sur une liste, son déroulement linéaire unidirectionnel et l’illusion de maîtrise des événements qu’il peut donner. Pour moi, il figure assez bien cette façon d’écraser la mémoire que nous avons parfois afin de « passer à autre chose ».

Les mots sont usités pour décrire et essayer de circonscrire le sinistre des faits. Les questions viennent ensuite, le plus souvent sans réponse.

Une installation, un roman-photo, un PowerPoint®, Renaud Gaultier 2018

Une installation, un roman-photo, un PowerPoint®, Renaud Gaultier 2018

Il m’est apparu logique de rassembler ces visuels en un multiple de douze, tant le calcul des heures et des marées se fait en douzièmes : ce diaporama en compte donc 72, un jusant dure six heures.

J’ai aimé laisser peindre et graver à même la surface en forme et à bouchains, laisser s’entamer le « gelcoat » avec la mer, le sable et les roches, leurs forces guidées et rythmées par les vagues et le vent.

La poésie du rivage prend un tour particulier sur l’estran, le recouvrement par le flot, la « laisse » qui jonche la plage après le coup de vent, cette limite changeante et parfois menaçante.

Ce diaporama** se lit à loisir, à la convenance de celle ou de celui qui le parcourt du regard. 

Chaque diapositive peut prendre son autonomie. Certaines explorent le paradoxe de l’abstraction, elle figurent une expérience vécue et ne représentent rien d’autre qu’elles mêmes. Objet – sujet – concret.

« Exposé des faits », pour traiter des images et de leur persistance, insolées ou non, en couleur RVB ou non, avec un logiciel usuel de « présentation » : de l’exposition, donc.

« Points de pouvoir » sur un objet-frontière***, car les lieux de douleurs sont les nœuds d’une soumission ou à tout le moins, d’un attachement voire d’un assujettissement.

« Il y a les morts, il y a les vivants, et il y a les marins » dit-on…, mais sont-ils libres pour autant ? »

Renaud Gaultier 2018

·       *et non Duchamp, même si le dada se cabre dans sa voile…

·       **le diaporama fait partie de l’installation composée du bateau, d’une projection, d’un son, et d’un ordinateur permettant de le consulter facilement sur écran. La bande son pourrait être composée d'extraits des "Litanies de la Vierge, Motets pour la Maison de Guise" de Marc-Antoine Charpentier (1643-1704) ou du motet Spem in Alium de Thomas Tallis (1505-1585), interprétation laissée au choix du regardeur.

·       *** Star S.L., Griesemer J. (1989), “Institutionnal ecology, ‘Translations’, and Boundary objects: amateurs and professionals on Berkeley’s museum of vertrebate zoologie”, Social Studies of Science.

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©Renaud Gaultier 1992-2023